Jean Ping égraine ses idées pour « un Gabon à l’abri de la peur et du besoin »
©Info 241, publié le 5 mai 2016
Jean Ping candidat à la présidentielle de 2016, a présenté mercredi à la Chambre de commerce de Libreville, en présence des partis membres du Front et de la Nouvelle Démocratie affiliés à sa candidature, sa vision, ses idées et propositions visant à changer l’avenir du Gabon autour de son projet de société intitulé, “Construire un Gabon à l’abri de la peur et du besoin”.
Pour l’ancien président de la Commission de l’Union africaine, diplomate de renom sous l’ère Omar Bongo, sa motivation à diriger le Gabon s’énonce en ces termes : « Instruit par une longue expérience tant au plan national qu’international, j’ai décidé de m’engager davantage au service de mon pays. Cet engagement, que je ne conçois pas de manière solitaire, m’a amené à parcourir le pays du nord au sud, d’est en ouest, ville par ville, village par village, case par case et famille par famille. J’ai pris grand soin de consulter les femmes, les jeunes et les sages. C’est en puisant dans ces échanges que j’ai décidé de me porter candidat à la magistrature suprême. »
C’est pourquoi dans un élan de rassembleur avec une consonance républicaine Jean Ping a appelé l’ensemble du peuple gabonais à penser l’avenir du Gabon avec une approche rénovée et des nouvelles mentalités : « je convie chacun et chacune à repenser et à restaurer l’État à l’aune d’une Nouvelle République portée par une vision, des valeurs, des objectifs et des principes clairement identifiés visant à construire ensemble un Gabon à l’abri de la peur et du besoin. » Avant de se lancer dans un diagnostic sur la gouvernance d’Ali Bongo du Gabon, qualifiée de chaotique par l’opposant du régime Bongo-PDG.
Diagnostic : “Un contexte de chute libre : le triomphe de la cupidité”
Brossant un examen de la gouvernance présidentielle d’Ali Bongo, Jean Ping s’est indigné : « Depuis sept ans, notre pays vit une crise sans précédent. Le Gabon n’a jamais été aussi près du chaos. La gestion calamiteuse de la chose publique, aux mains d’un tout petit clan qui contrôle ostensiblement tous les rouages du pouvoir (exécutif, législatif, judiciaire, et médiatique) pour amasser à la vue de tous l’argent facile, ne cesse de fragiliser le tissu économique et social. Le pays gronde. La corruption est endémique et la justice instrumentalisée. Notre pays est mal géré »
Pour le candidat qui ressasse à chaque sortie publique être résolument engagé à rompre radicalement d’avec le logiciel moribond et despotique du régime Bongo-PDG, « L’intérêt général est purement et simplement oublié. L’économie agonise, les investisseurs et les entreprises étrangères quittent le pays et les Gabonaises et les Gabonais, qui vivent un cauchemar, se sentent de plus en plus étrangers dans leur propre pays. La richesse du pays ne parvient pas à ses enfants. C’est le triomphe de l’amateurisme et de l’arrogance, de la cupidité et de la médiocrité, qui a donné naissance à un « État voyou » dont le chef de l’État est accusé, urbi et orbi, d’avoir fait fabriquer des faux papiers et notamment des faux actes de naissance. »
Poursuivant son analyse Jean Ping a expliqué à l’ensemble de l’assistance venue l’écouter à la chambre de commerce de Libreville « qu’en 7 ans, les crédits accordés au budget de la présidence de la République ont progressé de plus de mille pour cent ; incroyable mais vrai ! Cette situation débouche sur une crise de régime, une crise systémique. Il faudra donc bien que cela change et le plus tôt sera le mieux. Comme le disent de nombreux observateurs : « Ça suffit comme ça ! » Une économie malade. Un contexte international caractérisé notamment par la chute des cours du pétrole vient compliquer la donne. »
Tout en déclarant visiblement outré que, « cet élément conjoncturel contribue à mettre en relief les nombreux problèmes structurels dont souffre le Gabon : pillage des ressources naturelles du pays (bois, or, diamant) blanchiment de l’argent sale, enrichissement illicite, détournement des productions des entreprises, corruption endémique, et le chômage, notamment celui des jeunes. Pays riche, le Gabon est malade de la mauvaise gestion économique et financière, de la cupidité et de la mal-gouvernance. Ce sont là les causes essentielles de la situation dramatique dans laquelle se trouve notre pays. Un secteur social sinistré. La multiplication des grèves dans les secteurs privé et public rend encore plus complexe la lisibilité socio-économique. Le pays est souvent paralysé, l’activité s’est arrêtée. Les fonctionnaires qui continuent à occuper leurs bureaux n’ont plus rien à faire : ils attendent. »
Développant son diagnostic de la situation, perçue comme alarmante et décadente, du Gabon, Jean Ping a relevé que : « Les entreprises licencient massivement. Les enfants ne vont plus à l’école, le taux de chômage des jeunes avoisine des records et l’extrême pauvreté progresse dangereusement. Une Justice aux ordres. L’instrumentalisation de la justice est l’un des signes apparents de la décadence institutionnelle du Gabon, avec l’appropriation systématique de toutes les institutions républicaines, mises au service exclusif de l’homme fort du clan. »
Le natif d’Omboué n’est pas allé de main morte au sujet de l’accession à la magistrature suprême du président gabonais Ali Bongo Ondimba. Selon Jean Ping, « Son arrivée contestée au pouvoir, en 2009, est marquée par des violences et des tueries, notamment à Port-Gentil. Cinq ans après, le 20 décembre 2014, c’est un compatriote, Mboulou Béka, qui est froidement abattu. Quelques mois plus tard, c’est un autre, Béranger Obame Ntoutoume qui s’immole par le feu tandis que les crimes dits rituels ne cessent de progresser. »
Une crise politique sans précédent, a-t-il indiqué « marquée notamment par la déchéance des mandats des députés sans aucun respect des procédures, la démission du Président de l’Assemblée Nationale et le bâillonnement des collaborateurs qui osent refuser l’arbitraire et la mal gouvernance. Depuis lors, l’intimidation des citoyens et la chasse aux opposants sont ouvertes : les accusations fallacieuses, les arrestations arbitraires, les montages audiovisuels malveillants, les projets d’assassinat et d’empoisonnement se multiplient et alimentent sans cesse les conversations. Que faire ? » S’interroge le challenger d’Ali Bongo.
Dès lors, conclu Jean Ping dans son analyse sur la gestion du Gabon par le régime d’Ali Bongo : « Aujourd’hui, notre pays a plus que jamais besoin d’un sursaut salutaire. L’urgence de la situation et la perspective d’échéances futures inévitables m’obligent, en responsabilité, à apporter ma pierre à l’édifice. Les multiples leçons que je tire de mon expérience de la pratique politique nationale et internationale, ainsi que de nombreuses tournées que j’ai effectuées sur l’ensemble du pays, m’amènent, après avoir écouté mes compatriotes et entendu les doléances de la population, à proposer, en conformité avec les orientations de la plate-forme des forces de l’opposition qui me soutiennent, un projet crédible et réalisable, susceptible de sortir le pays de la situation scabreuse dans laquelle un petit groupe d’hommes et de femmes sans foi ni loi l’ont placé. »
D’où le diplomate gabonais propose de bâtir un Gabon nouveau avec un modus operandi qui semble trancher d’avec les pratiques du régime au pouvoir depuis 1967 dont il maîtrise les arcanes de gestion. Il faut que ça change, martèle Jean Ping en disant vouloir construire, « avec toutes les bonnes volontés et toutes les compétences disponibles, sans exclusive, une nouvelle République fondée sur : Une République unie dans la diversité au sein d’une Afrique solidaire et ouverte sur le monde ; un état de droit fondé sur la démocratie participative, la concertation et le respect des institutions et des libertés individuelles et collectives ; un pays de justice sociale et d’équité, où les femmes sont respectées et promues ; où les citoyens sont égaux en droits et animés d’un haut degré de sens civique, engagés pour le développement durable de leur territoire. »
“Bâtir un Gabon nouveau : les dix propositions concrètes de Jean Ping”
Pour Jean Ping, soutenu par une coalition importante de l’opposition gabonaise, « Il apparaît urgent de repenser le Gabon de fond en comble et de le réformer en profondeur. Mon projet pour le Gabon propose fondamentalement de construire, avec toutes les bonnes volontés et toutes les compétences disponibles, sans exclusive, une Nouvelle République fondée sur une vision, des principes et des valeurs partagés. Sénèque disait : ’’Il n’est point de vent favorable pour celui qui ne sait où il va.’’ En d’autres termes, explique M. Ping, « celui qui n’a pas d’objectif ne risque pas de les atteindre ». L’œuvre est immense mais ô combien exaltante ! »
Ainsi a expliqué Jean Ping, « Le Gabon doit demeurer une République et sortir une fois pour toutes des velléités monarchiques. Le Gabon est un État souverain, uni dans sa diversité au sein d’une Afrique solidaire, intégrée et ouverte sur le monde. Le Gabon doit être un État de droit, un pays où la gouvernance est fondée sur l’éthique, la démocratie participative, la concertation, le respect des institutions et des libertés individuelles et collectives et la défense des intérêts nationaux. Le Gabon doit devenir réellement une république indivisible, démocratique et sociale ; la souveraineté nationale appartient au peuple et au peuple seul ; le Gabon est un état unitaire décentralisé. »
Tout en ajoutant l’impérieuse nécessité et l’urgence de voir un Gabon où doit régner « une justice sociale et d’équité, avec des citoyennes et citoyens égaux en droit, animés d’un haut degré de sens civique, engagés dans un développement durable qui s’appuie sur un aménagement harmonieux et équilibré du territoire, sur une sécurité nationale crédible et efficace. Concernant les libertés individuelles et collectives, ajoute-t-il, je m’engage à : promouvoir, garantir et réguler la liberté de la presse, dans le cadre d’un pluralisme médiatique qui renforce la démocratie et le caractère unitaire de la nation ; faire respecter un code de déontologie par les professionnels de l’information et de la communication ; garantir un accès équitable de tous aux médias du service public. »
Jean Ping a insisté sur les chantiers et enjeux qu’il dit primordiaux et prioritaires dans son programme de société : « Le logement, la sécurité alimentaire, la santé et l’éducation sont les premières pierres de la Maison que je construirai pour tous mes compatriotes et c’est en investissant en vous, hommes et femmes, peuple de la Nation gabonaise, que nous y parviendrons. Vos besoins essentiels sont ma priorité absolue. Patriote, je veux porter l’espoir et le renouveau pour tous les Gabonais. Républicain, je veux rassembler tout le Gabon. Avec vous tous, je serai le président de l’alternance et du changement. Ensemble, nous redresserons le Gabon. »
« Chers compatriotes, chers patriotes, l’alternance et le changement sont en marche. Rien ne les arrêtera jusqu’à ce que s’ouvre enfin pour notre peuple une nouvelle ère d’espérance, de progrès et de prospérité, de liberté et de responsabilité. Il y va de la dignité du pays et du respect des Gabonais. Je vous invite à marcher ensemble sur ce chemin de la liberté et de la justice. Le jour de gloire est arrivé ! Une aurore se lève (…) C’est enfin notre essor vers la félicité ! » a conclu Jean Ping dans une tonalité fortement optimiste, en étant paraît-il, déterminé à en découdre avec Ali Bongo et son régime qui souhaite rempilé à la tête de l’Etat gabonais.
Libre à chaque citoyen gabonais enfin de jauger de la pertinence de ce projet de société et de ces propositions. Le son de cloche disant que l’opposition gabonaise n’a pas de projet pour le Gabon paraît désormais vain et creux. Même si, raison gardée, à l’état actuel du pays, avec des institutions dites républicaines conçues à la solde du pouvoir, avec une main invisible Françafricaine, avec des forces de l’ordre et de défense, une justice, tous acquis à gloire d’Ali Bongo, les observateurs avisés peuvent déjà soupçonner le résultat de cette élection présidentielle de 2016.
Chose espérer que les tenants du triptyque ’’Destitution-Transition-Election” puissent véritablement gagner du terrain dans leur démarche politique dont l’aspect opérationnel tarde à l’allumage. En impliquant notamment toutes les forces du changement, surtout le peuple gabonais à cette vision singulière d’alternance politique au Gabon. En attendant, retrouvez dans les lignes qui suivent de manière condensées, les dix fortes propositions contenues dans le projet de société de Jean Ping : “Construire un Gabon à l’abri de la peur et du besoin”.
1. Je rendrai l’école obligatoire et gratuite jusqu’à 16 ans et je réformerai le système éducatif, pour que chaque jeune fille et jeune garçon bénéficie d’une formation de qualité dans tous les domaines, et notamment dans les domaines scientifiques et technologiques. Je construirai des écoles et j’améliorerai significativement la condition de l’enseignant.
2. Je construirai des dispensaires et des centres de santé, y compris en zone rurale, dirigés par des personnels de santé qualifiés, correctement rémunérés et disposant suffisamment de médicaments.
3. Je développerai un système de transport de qualité (routes, rail, voie fluviale, maritime et aérienne) ainsi qu’un grand programme d’aménagement du territoire, de sorte que tous les Gabonais aient un accès égal à l’eau et à l’électricité ainsi qu’à un logement décent.
4. J’entreprendrai des réformes institutionnelles audacieuses, à cet effet j’établirai une véritable démocratie fondée sur l’équilibre des pouvoirs exécutifs et législatifs et sur l’indépendance de la justice et la liberté des médias en vue de faire sortir le Gabon de la peur.
5. Je mettrai en place les conditions d’une bonne gouvernance politique, économique, financière et sociale en réformant l’état et l’administration, en vue d’une gestion rationnelle des finances publiques.
6. Je lutterai résolument contre la corruption et la fraude dans les affaires publiques et mettrai tout en œuvre pour changer les mentalités et bâtir une société gabonaise du mérite et de l’excellence.
7. Je rassemblerai tous les Gabonais épris de justice et de paix afin de mettre en place les conditions pour que la justice indépendante et impartiale juge les méfaits, abus et crimes rituels, en vue d’une réconciliation nationale nécessaire au développement de notre pays.
8. Je décentraliserai effectivement le pouvoir au niveau des provinces, des intercommunalités et des villes, afin de rapprocher les citoyens des décisions, et je doterai les collectivités locales de ressources financières, humaines et matérielles leur permettant réellement d’agir.
9. Je lancerai des programmes de grands travaux et d’investissement publics et privés en vue d’accélérer la croissance économique, développer l’emploi, promouvoir
les PME/PMI gabonaises et les secteurs économiques essentiels et porteurs, tels que : l’agriculture, l’élevage et la pêche, la transformation du bois, le tourisme et l’écotourisme, l’industrie et l’agro-industrie, et les services.10. J’associerai la société civile (syndicats, ONG, associations, etc.) à la réflexion et à la prise de décision pour mettre en place les réformes nécessaires, à travers des concertations touchant tous les grands secteurs : éducation, santé, sécurité, etc.
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